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journal intime - Page 6

  • " Les ailes du desir."

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    Après l'anicroche d'Autheuil, une fois mes rires et mes raideurs, mes migraines épathiques et mes hébétudes narcotiques dissipées, je me sentis de fureur sacrée, pousser ,membraneuses, amples ,vibrantes des ailes d'Incube qui, crevant la nudité de mon dos, déchirant mes muscles en de violentes blessures, m’élevèrent jusqu'à des sommets inconnus de barbarie ou des serpents pythons semblables à mes rancœurs nouaient leurs anneaux d’aveugle sensualité autour du corps d’un Julien livide et supplicié.

    De mon gladiateur sacrifié, cependant, je ne perdais pas le gout, encore moins le désir de ces merveilleux désirs dans lesquels, tombant de fièvre quarte en chaud mal, de martyrs en voluptés, des semaines durant, je me consumais.

    Suppléant à une routine de médiocre tenue, l’effervescence ou je me débattais dés le saut du lit, lorsqu’elle ne dévorait pas mon sommeil de ses flambées impures apportait un éclairage nu, cru, frontal sur une existence pitoyablement bourgeoise, morne, indolente et atone en dépit des brèves secousses dont je talonnais ma monture afin de maintenir cette allure du petit galop qui jamais ne prenait un virage en dehors mais qui me semblait, toutes paupières cousues, plus épique encore que les chevauchées de hautes couleurs de ces preux d'Angleterre ,qu’emportaient dans un grand vent de pétales et d’oriflammes , les harmoniques baroques d’un poème de Beuern mis en musique par Carl Orff .


    La rage aux dents, encensant sous l’insulte d’une phrase mesquine -petite merde, salope, minet rupin, avait il dit - dont les ricochets suffisaient à me glacer d’écume, je m’acharnais à prouver à quelqu’un qui ne me demandait rien, plus qu’à moi-même qui n’en demandais pas d’avantage, que je valais mieux que ce que mes nuits cocaïne et champagne, ma vagabonde et farouche tribu Tzigane, mes blêmes amours mortes-nées dont les effigies de cire s’exhibaient dans un musée des erreurs entre la rue Beaubourg et le Boulevard Beaumarchais , laissaient entrevoir d’une personnalité en démolition avant même que de s'être construite .

    A la stupéfaction générale je congédiais mes dealers et mes amants, ne conservant pour le bon équilibre de mes nerfs qu’un petit rouquin dont le cul blanc comme un rêve de crème aimait à être battu jusqu’à l’incarnat des feux d’infamie et dont je me souviens qu’il se parfumait à la même eau de cédrat et de verveine que ma grand-mère, contrariant par là des bandaisons qui cependant ne demandaient qu’à s’ébaudir, ce à quoi elles consentaient de bien bonnes grâces, une fois le bambin , savonné , rincé et talqué à la poudre d’Iris .

    Plus étonnant encore je repris le chemin de la fac, me fondis, sage et bien peigné, débarbouillé de mes paillettes, privé de mes anneaux d'oreilles, de mes colliers d'émaux ,gardant juste au cou une croix de corail dont je pensais qu'elle me portait bonheur, dans la masse houleuse et moutonnante d’une promotion que j’imaginais fade et triste , alors qu’elle était rieuse et bohème, me découvris le gout des livres et de l’étude , l’amour de l’histoire , de l’art , de l’histoire de l’art et finalement passais comme en me jouant des examens que l’on disait redoutables .

    Dans la foulée et puisqu’un bonheur n’arrive jamais seul, je décrochais un entretien d’embauche – des entretiens devrais je écrire car on demanda à m’entendre six fois –auprès du voyagiste plein de mansuétude et d’abnégation qui aujourd’hui m’emploie encore.

    « -Ainsi, riait Julien tandis qu’il embrassait mon ventre nu, c’est un peu grâce à moi que tu es ce que tu es.


    J’étendais mes doigts en serres pour agripper ses boucles brunes et drues, tirais en arrière sa belle tête halée.

    « - Au vu du résultat, il n’y a pas de quoi pavoiser.

    Julien détachait mes mains de ses cheveux, pesait sur mes avant-bras jusqu'à ce qu'ils cèdent, tandis que son corps sur le mien devenait plus lourd.

    « - Et si je te disais que cette après midi là, à Autheuil, petite merde, petite salope, petit minet rupin, si je te disais que moi, je t’aimais déjà !

    Je cherchais à croquer une bouche irrégulière, vivante, mobile, une bouche de beurre, de sucre, de rhum doux et qu’il me refusait.

    « - Je te dirais moi, qu’il faut laisser aux vrais menteurs le soin de bien mentir, Monsieur l’observateur pernicieux de la vie des autres, Monsieur le journaliste !

    Avec violence, avec douceur, enfantin, il me mordait au sein.

    « - Je te haïssais, c’est donc que je t’aimais un peu.

    Je me dégageais de son étreinte, roulait sur le flanc pour mieux revenir aussitôt me pendre à son cou.

    « - J’aime bien quand tu m’aimes moins, et mieux lorsque tu me détestes un peu.

    Graves et beaux ses yeux du bleu perçant des pervenches viraient au mauve presque noir des violettes Italiennes et des eaux profondes.

    « - Une chose est certaine, mon terrifiant amour, devrais je vivre cent ans et faire cent fois le tour du monde, il n’y a aucune chance que je recroise un jour une plus somptueuse tête à claques que toi.

  • " Les trois mères."

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    Profitant de l’absence de mon homme retenu Dieu sait ou, j’organisais, la semaine passée, un diner de « poufs » à l’intention de mes trois mères.

    « Mater Suspiriorum », la mère des soupirs.
    « Mater Tenebrarum », la mère des ténèbres.
    « Mater Lacrimorum », la mère des larmes.

    Vous savez désormais dans quel chaudron de sorcières Dario Argento puisa l’inspiration de sa célèbre –et très inégale –trilogie.

    Filles adultérines de Shakespeare et de Tchekhov, mes malheureuses tantes se virent échoir la tache impossible de m’élever correctement ce dont elles s’acquittèrent avec un amour infini et une totale absence de cervelle, me laissant croire longtemps que j’étais spécial – et sans doute l’étais je réellement-, bien supérieur au commun des mortels ; un roitelet encagé dont le bon-plaisir dépendait de son seul bon-vouloir; m'incitant à cultiver le caprice comme une vertu , l’ironie comme un art , l’insolence comme un devoir, les déviances en tous genres comme une forme absolue de la liberté.

    Bref, on peut dire sans trop se tromper que se fut dans les personnalités complexes de Liouba, Stassia et Sasha que Vania-Vassili-Stéfan pucha à pleins baquets les philtres noirs et roses d'ou émana dans d'obscurs parfums ,mi fauve , mi fleur « Mauvaise . Graine ».


    De mes tantes, vous connaissez déjà la reine mère, Liouba; fausse bourge croulant sous le fric et l’adoration d’un mari encore ébahit, vingt cinq ans après qu’elle daignât lui adresser la parole.


    A présent, j’aimerais vous présenter Stassia et Sasha.

    Stassia- Anastassia à l’état civil- c’est le mec de la famille.


    Une femme forte, directe, virile, une femme intelligente et abrupte.


    Au contraire de ses sœurs, obsédées par la mode, et bien qu'elle possédât des pièces de très haute qualité, Stassia ne prêtait pas trop d’attention à la manière dont elle s'habillait. Constamment sur le pied de guerre, elle répugnait à consacrer du temps au choix de ses vêtements, à assortir ses chaussures à son sac.

    Ainsi, il lui arrivait de porter un somptueux manteau de fourrure sur une jupe en maille et un cardigan, un jean râpé et un T-shirt en coton avec un sublime collier de perles.

    C’est une femme en action plus qu'une femme d'action


    Spécialisée en chirurgie vasculaire et thoracique, elle mène d’une main d’acier la clinique que nous a légué papy.

    Sans jamais se marier elle a eut deux garçons, de deux hommes différents.


    Elle les élève, les pauvres, comme elle gère ses affaires.

    Virilement !

    Du reste, elle réprouve à utiliser ce qu'on appelle les armes "féminines" : la fragilité, la douceur, le charme.


    Cependant, lorsqu’un garçon lui plaît, et l’amazone en fait une consommation digne d’un pédé, forcément, elle change de registre !

    Sasha –Alexandra à l’état civil- est comédienne.


    Elle cachetonne dans des films que personne ne voit jamais, joue dans des pièces undergrounds tellement ennuyeuses que le public, s’il y en a, s’immole par le feu avant la fin du Premier acte.


    Plus jeune, elle vécu quelques années en Italie ou elle devint vedette de "Fumetti", ces romans-photos à l'eau de rose dont la péninsule est friande.


    Anarchiste et mondaine, elle eut longtemps pour devise « La bombe à neutrons oui, mais pas sur « Fauchon » »

    Petite fille, elle était rêveuse, elle écoutait les autres, elle ne parlait pas.
    Autour d’elle chacun se montrait très volubile alors qu’elle, muette se cachait derrière son père et ses sœurs. Timide, elle aimait pourtant se déguiser, jouer à des jeux de société.

    Déjà, elle se trouvait partagée entre le rêve et l'envie de vivre.


    Sans doute est elle devenue comédienne pour combler le fossé séparant le monde qui l'entourait de celui qu’elle imaginait.

    Elle aussi à deux fils, aucun du même père.

    La semaine passée, donc !



    Au menu, outre notre sempiternel Caviar de la Caspienne et ses accompagnements, du sucré, rien que du sucré.


    Mignardises, Baklavas, assortiment de Carolines, Florentins aux cerises et au gingembre, macarons, orangettes, sablés au citron, Muscadines, Diamants à la vanille et dentelles croustillantes au chocolat.



    Toujours au menu, ragots, potins, bouchées au vitriol, becquées à l’arsenic, goulées d’acqua-toffana.


    Pas d’alcool.


    Uniquement de la Vodka au piment et au miel, servie dans des dés à coudre que nous vidions d’un trait entre deux rosseries.


    Gavée de tisanes et d’ascèses, le corps et l'esprit purifiés, plus enragée encore que de coutume, Stassia rentrait à peine d’une cure Italienne.


    Trois semaines de retraite dans un monastère Lombard quelque part du coté de Brescia à bouffer du radis et à macérer dans la vase, tout cela pour le prix d'une Ferrari, il m'eut étonné qu'elle en sortit aussi jouasse que d'une soirée au « Baron ».

    Dès l’apéro elle commença son show.

    « -Mais quelle expérience fooormidaaaable ! Je me sens comme une ado, c'est dingue.

    « -Comme une ado ? Tu veux dire mal dans ta peau et ravagée par l’acné ?

     
    « -Je veux dire encore suffisamment vigoureuse pour claquer le beignet d'un grand cornichon irrespectueux lorsqu'il le mérite.


    Comprenons nous bien, j'aime mes tantes, je tuerais sans la moindre hésitation quiconque tenterait de leur faire du mal ; mais leur numéro de sœurs siamoises éprouvé, usé jusqu' à la corde, cette obstination qu'elles mettent à être toujours en représentation ; Liouba dans son rôle de grande bourgeoise enjouée, dépourvue du moindre état d’âme, Stassia en gloire du bistouri, ressassant à plaisir des histoires de bloc à vous dégouter à jamais de la bidoche ; Sasha en artiste maudite et spécialiste du Name dropping ,me font, je l'avoue doucement soupirer.

    Enfin, j'imagine que dans l’histoire, elles sont encore les plus à plaindre.

     

    Avoir élevé un énergumène de ma trempe ne doit pas être si facile à assumer.


    Déjà, à l’image de mon père, j’avais refusé de faire médecine et de reprendre la gestion de la clinique dont mon grand père et mon arrière grand père avant lui avaient construits l’excellente réputation.

    FLASHBACK :

    Liouba, paniquée

    : « -Mais qu'est ce que tu racontes à la fin ? Tu as perdu la tête. Tu es l’ainé des garçons, tu te dois de reprendre le flambeau.

    Moi, adolescent révolté sans aucun motif de révolte légitime

    : « - Si je reprends le flambeau, ce sera uniquement pour foutre le feu à cette putain de clinique.

    Stassia, calme et venimeuse

    : « - Putain de clinique qui soit dit en passant t'a permis de ne manquer de rien .Parce que si tu avais dut compter sur les singeries boulevardière de ton père pour manger du Caviar , tu n’en connaitrais toujours pas le gout ! Je crains que nous ne t’ayons trop gâtés mes sœurs et moi. Un corbeau ! Nous avons élevé un corbeau et aujourd’hui, il nous arrache les yeux.

    Sasha véhémente

    : « - Il a raison ce petit ! Fuck la tradition ! Vie ta vie mon chéri, ne te laisse influencer par personne!

     

    Stassia, furieuse

    : « - Toi la rouge, personne ne t’a sonnée ! Il reste une communiste sur terre, encore faut il que se soit ma sœur ! En plus comme exemple de réussite professionnelle tu te poses un peu là cocotte ! Tu as tourné dans quel bouche programme cette année ? Quelle famille ! On est vraiment bien montés !

    Moi goguenard

    : « - Plutôt, oui ! En tous cas mes amants ne se plaignent pas !

    Liouba, effondrée

    : « - Il est con ce gosse ! Tu le fais exprès ou tu as pris des cours ? Parlons peu, parlons bien ! Tu veux faire quoi à défaut de médecine ? Tu as bien, sinon une vocation, du moins une idée de ce qui te plairait ?

    Moi, parfaite tête à baffe

    : « - Nan, chais pas. Pour l'instant j'ai juste envie de m'éclater la mouette.

    Stassia, dans un grand élan de tragédie

    : « -Mais ce n'est pas un métier, ça !

    Aujourd’hui encore , Liouba et Stassia ne se sont pas faite à l'idée que je ne sois pas le professeur machin ; mais que voulez vous pour avoir été élevé dans le sérail , parmi les vapeurs d'éther et les mandarins , je sais que ce monde de sacrifices , de tension et de mort n'est pas le mien ; d'autant que dépourvu de la moindre compassion j'eus fait un médecin déplorable .


    En revanche, que je sois pèdè ne leur a jamais posé de problèmes ; Sasha parce qu'elle est la bonté et l'abnégation même ; les deux autres parce qu'elles trouvent cette originalité aussi tendance qu'un sac Birkin.

    Pourtant confrontées aux hommes de ma vie, Liouba et Stassia, au demeurant intelligentes, cultivées et sommes toute tolérantes se sont toujours comportées en parfaites imbéciles.

    Ainsi, Liouba ne peut s'arrêter de parler, ce qui ne serait pas si grave si elle n'enchainait les maladresses.

    Ainsi, Stassia, d'ordinaire fine conteuse, se contente de proférer des banalités avec l'embarras et le teint fleuri d'une charcutière en rupture de rillettes.


    FLASHBACK



    Liouba déguisée en chasse Espagnole un jour de Marie, sautoirs de perles, larmes de diamant, cabochons de rubis

    : « -Mon dieu, mais qu'il est beau !!! Il n'y a pas à dire, mon chéri, tu sais les choisir.

    (Sous entendu : Vous êtes, jeune homme le 4400 eme fiancé potentiel que notre neveu nous présente. Vos prédécesseurs sont passés plus vite que le café ; ne vous faites aucune illusion, votre règne sera court.)

    Stassia, à la recherche d'un intérêt commun

    : « - La médecine vous intéresse ? Non ! Ca m’aurait étonnée ! Oui, nous sommes médecins de père en fils dans la famille ! Enfin de père en filles, parce que les garçons, hélas…..Enfin, j’imagine que ce que je vous raconte ne vous intéresse pas !

    Liouba, en aparté, d'une voix de contralto qui doit s'entendre jusqu’à Courbevoie

    : « -Celui ci au moins est bien élevé.

    (Sous entendu : Vania a d'ordinaire du goût pour les voyous au point que je craignais, à chaque fois, qu'ils ne filent avec l'argenterie à la fin du diner. Franchement mon pauvre petit, je ne veux pas vous faire de peine, mais, vous n'êtes pas de taille.)

    Stassia, tatillonne

    « - Votre père est dans la carrière m’avez-vous dit ! Et votre maman ? Femme au foyer, bien sur ! Le syndrome de Wistéria lane en somme ….. Ah, vous avez trois frères ! Belle famille ! Tous du même père ?

    Liouba, insidieuse

    : "- Et que fait il dans la vie, ce grand garçon ? Guide accompagnateur trilingue, quelle bonne idée ! Vous ne devez pas souvent être chez vous ! Remarquez, Vania non plus !

    Sasha rêveuse

    « - J’ai couché avec un guide, une fois en Turquie ! Ce n’était pas terrible ! Le guide, pas la Turquie !

    Stassia, décidément obstinée

    : « - Vous chassez, bien entendu ! Non ? Comme c’est bizarre ! Oui, j’ai dit bizarre ! Vous savez que Vania adore chasser. . Ah, si, si je vous assure Vania est un chasseur émérite. Je dirais même une fine gâchette, n’est ce pas mon chéri ? La première fois qu’il a tirée, il n'avait pas huit ans.

    Moi, narquois

    : « -Tout de même pas ! J’ai connu mon premier mec à quinze ans !

    Liouba, perfide

    :"-Ne l’écoutez pas, cet enfant est idiot ! Personnellement, j’ai les armes à feu en horreur, mais il faut bien reconnaître qu’à toute chose malheur est bon. Au moins Vania est il capable de se défendre.

    (Sous entendu : A votre place j'éviterais de faire du mal à mon neveu à moins que vous ne teniez à vous faire exploser les rotules à coup de Beretta.)



    Mais comment doté d’une famille pareille voulez vous que je garde un mec?

     

  • " Viens à la Maison."

    vania-maison.jpgRentrer chez moi, même si je n’en suis parti ni pour bien longtemps ni bien loin, me procure toujours un plaisir intense.

    Lorsqu’on voyage aussi souvent que mon métier m’oblige à le faire, on besoin d’un point d’attache, d’un point d’ancrage.

    On a besoin de racines autres qu’organiques, autres que familiales, autres que celles enchevêtrées dans le terroir ou croissent ces longues amitiés qui, en dépit des bourrasques, perdurent.


    J’aime l’idée de « La Maison », qu’elle soit studio ou château.

    Je sais, et cela me rassure, que je ne quitterais pas de sitôt l’appartement que j’occupe actuellement .

    Peut être même ne le quitterais je jamais. Je l’habitais déjà avant mon exil Romain, et si d’autres y ont vécu durant mon absence, ils n’y ont pas laissé de traces assez profondes pour que je m’y retrouve dépaysé à mon retour.


    C’est très éclectique chez moi.

    C’est un peu, disons, le bordel, non au sens du désordre, du chaos, mais par un mélange de styles qui fait que, finalement, ma maison ne peut prétendre à aucun style au sens pur et dur du terme.

    Du reste, je ne recherche pas plus l’équilibre en matière de décoration, que je ne le recherche dans mon quotidien émotionnel.

    J’ai pour habitude de dire que mon chez moi n’est pas décoré mais encombré. Surtout il est habité. Habité par moi.

    Et aujourd’hui, comme hier la griffe que j’y impose – a moins qu’elle ne s’impose d’elle-même – ne cesse de me surprendre.

    Il est vrai que souvent, la combinaison d’objets d'époque et de style différents débouche sur des mariages beaucoup plus heureux que les mariages évidents du bon gout, du bon ton.


    Pour résumer, je vie dans un décor « art déco-japonisant » auquel je suis attaché plus que je ne le devrais. J’essaie cependant de ne pas laisser les choses, les objets exercer trop d’influence sur moi.

    Elles m’apportent évidement un certain bien être, mais en parfait vagabond, en nomade, en bohémien, je redoute qu’elles ne finissent par m’entrainer vers une forme d’esclavage, de sédentarisation qui, peu à peu, insidieusement prendrait le pas sur l’appel du grand large.


    De plus ma relation à un objet n’est jamais une relation à sens unique. Souvent l’objet me procure du plaisir, mais il arrive aussi qu’il me contrarie ou pire qu’il me contredise.


    Le plus curieux, lorsqu’on me connaît un peu, est de constater qu’en matière de décoration, je suis toujours allé dans la même direction.

    Par exemple, je possède une armoise chinoise qui vient de chez un grand antiquaire.

    Une très belle armoire, XVIIe siècle.
    L’acquérir fut une réelle folie ; de celles qu’on s’autorise à vingt ans lorsque l’acte précède de longtemps la réflexion.
    Par testament, mon grand père m’avait laissé quatre sous afin de m’aider à terminer mes études ; je les ai sans hésitation investis dans cet achat disproportionné.

    Qui plus est la bricole n'allait pas du tout dans l’appartement moderne que j’occupais à l’époque.

    Mais comment résister à un coup de foudre lorsqu’une simple étincelle suffit à vous faire partir en torche ?


    Elle m'a toujours suivi depuis cette armoire.

    De la rue d’Aboukir à la rue de V. ; de la rue de V. à la Via Gregoriana ; pour revenir encore rue de V.


    Dans la famille nous l’évoquons comme l’héritage de papy.

    Du reste, papy ne m’en aurait probablement pas tenu rigueur. Personne mieux que lui ne savait à quel point je peux me montrer déraisonnable.

    L’objet d'art a toujours fait partie de ma vie.
    Depuis longtemps.
    Très jeune j'allais déjà fouiner aux Puces. Et à choisir, je prenais toujours un objet ancien.
    J'aime le plaisir de découvrir.

    Je soupèse, je palpe, je renifle, je trouve, je repose ou j'emporte. J'ai une relation physique avec les choses.

    Si j'aime toucher une poupée ancienne, c'est parce que, grâce à elle, je m'invente des souvenirs qui appartiennent à d'autres et des regrets sur le temps qui file. Derrière son sourire statique et irréel, la poupée me fait aimer ceux qui l'ont créée.


    Ma prédilection va surtout au XVIIIe, méditerranéen, provençal même. Les meubles peints, ou de la Haute Epoque, les teintes chaudes un peu passées.

    La maîtrise de la matière des œuvres anciennes m'émeut mais certains objets industriels, des années cinquante par exemple, arrivent aujourd'hui à me toucher tout de même un peu.

    Avant, je ne les aurais même pas regardés. L'œil s'habitue si vite à la nouveauté, à la mode.


    J'apprécie beaucoup l'art déco et l'art nouveau. Je suis également très sensible à l'art oriental. Certaines pièces japonaises me plaisent énormément.


    En revanche, chez moi, vous ne trouverez pas de ces bouquets " ikebana "que l’on voit dans quasiment tous les décors Japonisants. Je préfère composer moi même d'énormes bouquets de roses anciennes, d’Iris, de Zantedeschia, de bâtons de haute Cannelle que je place dans des vases marocains...

    Ceci sans aucune prétention artistique. Je le fais vraiment pour moi et mes amis. Mais avant tout pour moi, égoïstement je dois bien l’avouer.


    Vous n’y verrez pas non plus de photos en raison du rapport particulier que j’entretiens à l’image. Moins à la mienne du reste qu’à celle de mes proches. Les photos des gens que j’aime, je les conserve dans des endroits cachés, à l'intérieur des portes. Je refuse l’idée que nous soyons regardés comme des images faisant partie du décor, faisant décor.


    C’est peut être pour cela que je ne publie sur ce blog que des photos, qu’elles me représentent ou non, retouchées, revues et corrigées, déviées.


    Présenter mon image ou celle des personnes ayant joué un rôle dans ma vie, de manière frontale, crue, nue me serait d’ailleurs tout à fait impossible.


    Vous l’aurez compris, la décoration de mon « chez moi » tient une place importante dans ma vie et ceci aussi loin que je me souvienne.

    Lorsqu’à dix huit ans j'ai eu mon premier appartement, avant même d’y déposer une chaise, je suis allé acheter des fleurs à Baltard.

    Cependant, je ne considère pas la décoration comme un art de vivre, mais plutôt comme une façon de vivre.
    Une façon de vivre qui englobe beaucoup de choses, tant je suis très attirée par de nombreux domaines.

    Le shiatsu m'intéresse, par exemple.

    Il touche au corps, en profondeur autant qu’en surface.

    J'en ressens un résultat profond, assez durable. Mon maître shiatsu m'a expliqué que j'avais la chance de posséder une nature énergique.

    C'est ce que j’appelle la "chance des gènes», cette énergie vitale insensée dont bénéficient tous les membres de ma famille : une énergie qu’il m’arrive hélas de trop souvent gaspiller.


    D’ordinaire, les personnes attirées par les "choses asiatiques" ont le goût du pur, du dépouillé. Or moi, j'aime le baroque de Saint Laurent, j'aime le shiatsu, j'aime l’opulence.


    Opulence et simplicité seront donc au menu ce soir, puisque j’ai pour habitude de convier mes amis les plus proches à un réveillon d’été dans les jours qui suivent Aout.

    Le traiteur Thaïlandais que j’ai consulté m’a suggéré une cuisine légère, délicate et parfumée.

    Il servira des cailles rôties aux épices, une salade de mesclun au tourteau frais, des brochettes de poulet et crevettes sauce Satay, des rougets grillés au Gingembre et du Sticky rice au lait de coco accompagné de mangues.


    Comme disait l’autre : « Bon appétit Messieurs, conseillers intègres, ministres vertueux ».


    Seul bémol, nous ne serons que huit alors que j’ai commandé pour neuf (bêtement, j’avais espéré la présence de Chris).


    L’un d’entre vous veut il se joindre à nous ?


    Promis, je ne mords pas ; je suce!